Un guide concret pour accompagner les élèves à besoins spécifiques

Pensé pour les enseignants de terrain, ce livre propose des outils concrets et des adaptations pédagogiques efficaces pour accompagner les élèves porteurs de troubles des apprentissages (dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, etc.).
Géraldine Loty, forte d’une solide expérience en classe et d’une expertise en orthopédagogie, partage des stratégies testées et approuvées pour aider les élèves à mémoriser, comprendre, apprendre, s’organiser et rester motivés au quotidien.
Accessible, bienveillant et ancré dans la réalité scolaire, cet ouvrage est un véritable compagnon de route pour les enseignants désireux d’offrir un cadre plus inclusif et stimulant à chacun de leurs élèves.
Nous avons eu le plaisir de rencontrer Géraldine Loty, son autrice qui nous a fait l’amitié de répondre à quelques questions.
🔹 Peux-tu nous parler de ton parcours et tes motivations
Pouvez-vous nous parler un peu de vous et de votre parcours dans le monde de l’éducation ?
J’ai été professeure des écoles (enseignante de primaire) pendant 25 ans. Je me suis très tôt intéressée aux élèves à besoins particuliers. Je me suis beaucoup formée et informée sur les troubles dys et les outils d’adaptation et de compensation qui permettent à ces élèves de s’affranchir d’une partie de leur handicap. J’ai également eu la chance d’exercer à l’étranger et d’observer d’autres pratiques. Il y a 4 ans, alors que je cherchais à réorienter ma carrière, j’ai découvert le métier d’orthopédagogue et j’ai suivi la formation d’EFO (Ecole Française d’Orthopédagogie) à Lyon. J’exerce en cabinet depuis bientôt 2 ans. Je continue donc d’accompagner les élèves en difficultés d’apprentissage mais dans un autre cadre.
Qu’est-ce qui vous a amenée à vous intéresser particulièrement aux élèves « dys » ?
Au sortir de ma formation initiale d’enseignante, je me suis rapidement sentie impuissante à faire progresser les élèves en difficultés à la hauteur de leurs capacités. Ce sont des élèves intelligents et volontaires qui méritent une scolarité à égalité avec leurs pairs. J’ai commencé petit : avec un vieil ordinateur qui dormait chez moi (et l’aide technique de mon mari !) et que j’ai apporté en classe pour en faire bénéficier un élève qui présentait une dyslexie sévère. Puis, j’ai suivi de près sur les réseaux l’évolution des outils disponibles, jonglant avec mon matériel personnel et celui des écoles dans lesquelles j’exerçais quand il y en avait.
À quel moment avez-vous senti le besoin d’écrire ce livre ? Quel a été le déclic ?
Pour être honnête, c’est le Dr. Michèle Mazeau qui m’a sollicitée. Elle voulait écrire un livre à destination des enseignants qui lie la théorie et la pratique. Elle est experte dans les troubles des apprentissages et cherchait une enseignante de terrain qui connaisse bien les outils. Son idée était de combiner dans ce livre le pourquoi et le comment : une partie qui explique les fonctions cognitives sollicitées dans les tâches scolaires afin de bien cerner ce qui peut gêner l’élève dys dans son apprentissage et une autre qui donne des pistes concrètes d’adaptation et de compensation pour palier précisément à cette gêne, directement utilisables en classe.
🔹 Sur ton livre et son contenu
À qui s’adresse votre livre « Dys : outils et adaptations dans ma classe » ? Aux enseignants ? Aux parents ? Aux deux ?
Il s’adresse en premier lieu aux enseignants mais plus largement à tous ceux qui souhaitent accompagner un élève dans la mise en place d’aménagements, et surtout comprendre quel outil pour quel besoin. Il peut donc intéresser des parents et des professionnels comme les orthophonistes, les orthopédagogues ou des ergothérapeutes.
Que va-t-on y trouver concrètement ? Des fiches pratiques ? Des témoignages ? Des exemples d’adaptations ?
Le livre est divisée en plusieurs parties correspondant aux différentes tâches scolaires : lire, écrire, compter, mémoriser. Chaque partie contient 2 sous-parties : la première est consacrée à la description des fonctions cognitives sollicitées dans la tâche et la seconde présente les outils qui permettent d’adapter pour palier la fonction cognitive déficitaire. La première partie est capitale pour comprendre la seconde. En effet, l’outil adapté est celui qui cible la fonction déficitaire. Il ne suffit pas de savoir que l’élève est dyslexique-dysorthographique (par exemple) pour lui donner une dictée à trous. Il faut d’abord comprendre la cause de sa dysorthographie c’est-à-dire quelle fonction cognitive exactement lui fait défaut : est-il dysorthographique parce qu’il a des difficultés phonologiques (mauvaise maîtrise de la correspondance grapho-phonologique), ou parce qu’il rencontre un problème de mémorisation de la forme visuelle des mots, ou bien parce qu’il présente un trouble de l’attention, ou encore une mémoire de travail trop fragile qui ne lui permet par d’automatiser toutes les procédures d’accords. Chaque cause va appeler une adaptation différente. A cette condition seule, l’adaptation proposée pourra être efficace. Sinon, c’est la déception assurée, pour l’élève comme pour l’enseignant.
Parmi tous les outils que vous proposez, y en a-t-il un que vous recommandez en priorité à un enseignant qui débute avec des élèves « dys » ?
Certains outils sont polyvalents et permettent de répondre à plusieurs besoins et donc peuvent être utiles au sein d’une classe ou d’un établissement pour convenir à plusieurs élèves qui n’ont pas les mêmes difficultés. Par exemple l’application Notability sur iPad, ou le logiciel Studys sur Word ou le cartable CanToo Scribe. Ces 3 outils proposent une dictée vocale, une lecture vocale, des prédicteurs ou correcteurs orthographiques, des organiseurs de cahiers/dossiers (pour s’approcher le plus possible de l’organisation classique avec cahiers des camarades), des outils de mathématiques et géométrie.
Pour un enseignant qui débute avec un élève dys, je conseille de commencer modestement. Ne pas vouloir tout adapter tout de suite. Cibler une ou deux matières, celles dans laquelle l’élève est le plus gêné par son trouble. Commencer modestement est une garantie de ne pas abandonner. Il n’y a pas de petits pas qui ne servent à rien : chaque pas compte et fait une grosse différence pour l’élève.

🔹 Sur les enjeux pédagogiques
Selon vous, quels sont les plus grands défis que rencontre un enseignant face à des élèves présentant des troubles « dys » ?
Le plus grand défi est de bien identifier d’où vient le problème pour ne pas plaquer un aménagement « passe partout ». La mise en place d’aménagement demande beaucoup de travail et d’investissement à l’enseignant comme à l’élève. Alors si l’efficacité n’est pas là, la déception est grande pour tous.
L’enseignant peut également se heurter au refus de l’élève qui ne souhaite pas être différent des autres élèves de la classe. Cela demande un travail en amont qui n’est pas toujours facile à mener.
L’autre défi, pour l’élève cette fois, est la pérennité des aménagements d’un professeur à l’autre, d’une année à l’autre. Il peut y avoir de grandes disparités. C’est alors particulièrement compliqué pour l’élève.
Quelle est, selon vous, l’erreur la plus fréquente que l’on commet (même avec les meilleures intentions) avec les élèves « dys » ?
L’erreur (que j’ai commise plus d’une fois !) est de penser que toute notre bonne volonté suffira. En fait, pour que ces aménagements fonctionnent, il faut une conjonction de nombreux facteurs : une acceptation par l’élève lui-même, mais aussi par sa famille (qui doit valoriser aux yeux de l’enfant cette nouvelle façon de travailler), mais aussi les moyens techniques. Ce dernier point est souvent central : lorsqu’il s’agit d’un matériel fourni par l’école ou le collège, nous n’avons pas la main pour y installer les outils pertinents, et lorsqu’un dysfonctionnement apparaît, les services informatiques sont souvent peu réactifs à les résoudre. Cela entrave le travail quotidien de l’élève et cela peut être décourageant.
Pensez-vous que la formation des enseignants est aujourd’hui suffisante sur ces questions ?
Non. Il y a d’une part une méconnaissance des troubles du neurodéveloppement chez de nombreux enseignants et cela les gêne pour comprendre les difficultés rencontrées par leurs élèves. Mais il y a d’autre part une méconnaissance des outils numériques en général. De nombreux enseignants se sentent effrayés par l’outil numérique qu’ils ne maîtrisent pas. Ils n’en comprennent pas non plus les fonctionnalités ni tout le potentiel. Ils le perçoivent souvent comme une charge de travail supplémentaire.
🔹 Sur l’inclusion et la pédagogie
Est-ce que les adaptations pour les élèves « dys » profitent aussi aux autres élèves de la classe ?
Oui ! J’ai parlé plus haut d’outils numériques d’adaptation et de compensation. Mais ils ne sont qu’une partie des aménagements proposés à l’élève dys. De nombreuses pratiques pédagogiques sont également centrales comme l’enseignement explicite, la pratique de la réactivation et de l’espacement grâce à des quizz motivants et d’autres principes de neuroéducation. Ces pratiques sont des piliers pour enseigner à des élèves en difficultés des tous horizons qu’ils soient dys ou non (car tous les élèves en difficultés ne sont pas dys, évidemment). Et elles ne nuisent en rien aux élèves sans difficultés. C’est le principe de l’école inclusive.
Comment faire pour inclure ces adaptations dans la pratique quotidienne, sans se sentir submergé ?
C’est un peu le problème lorsqu’il s’agit d’adaptations informatiques… C’est pour cela qu’il faut commencer modestement, pour ne pas se sentir submerger. Et au fur et à mesure qu’on se sent à l’aise, on peut accroitre son champ d’action. Le plus compliqué à gérer pour les enseignants ce sont les contraintes techniques liées au numérique. Nous ne sommes pas des informaticiens, et face à un bug du système, aux mises à jour à faire… nous sommes souvent démunis. Il faut à nos cotés un service informatique présent, compétent et réactif !! Lorsqu’on utilise un iPad, on peut se tourner vers la communauté fb « En classe avec mon iPad et mon handicap », portée par l’association Belge « Cœur à Corps ASBL». Cette page est d’un soutien sans faille pour tous les petits et grands bugs du quotidien. C’est très précieux pour rester enthousiaste et motivé !
Avez-vous eu des retours d’élèves ou de familles qui vous ont particulièrement marquée ?
Je me souviens de Jean, 10 ans, en CM2 (dernière année de primaire). Dysgraphique, il peinait particulièrement en français car il fallait beaucoup écrire pour les rédactions, les exercices de grammaire ou de conjugaison. A l’époque, nous avions quelques ordinateurs à disposition dans la salle informatique attenante à la classe. J’ai adapté tous les exercices du manuel avec les outils du Cartable Fantastique afin qu’il n’ait plus qu’à cliquer ou taper quelques mots au clavier pour répondre. Il a découvert qu’il était plutôt bon en français et ne rechignait plus à travailler cette matière. Quand j’ai vu la différence que cela a produit sur cet élève, cela m’a donné des ailes ! Aujourd’hui jeune homme, il avait un coup d’avance en arrivant dans l’enseignement supérieur où tous les étudiants passent sur clavier. Il suit la scolarité qu’il a choisie, dans les meilleures conditions. Sa maman, pour qui le passage au clavier de son enfant avait été douloureux (« Je dois donc faire le deuil d’un enfant qui écrit à la main ») me donne avec joie de bonnes nouvelles de son fils lorsque nous nous croisons.
🔹 Pour conclure
Vous proposez des formations et des conférences. Est-ce envisageable de vous voir passer par la Belgique ?
Bien-sûr. Je me déplace à la demande d’établissements ou d’organismes qui souhaitent former leurs enseignants ou formateurs aux troubles dys et la mise en place d’outils d’adaptation et de pratiques orthopédagogiques dans leurs classes.
Un projet à venir ? Peut-être un second livre ?
Je m’apprête à publier sur mon compte fb plusieurs tutos qui présentent et comparent quelques outils polyvalents.
Avec une équipe d’orthopédagogues et psychologues québécois et français réunis autour de Pierre-Paul Gagné, je collabore à la mise en place d’une plateforme de partage de ressources spécialisées à destination des professionnels de l’accompagnement d’élèves en difficultés : metacocerveau.com
Pas de second livre prévu dans l’immédiat.
🔹 Où peut-on se procurer votre livre et suivre vos actualités ?
La 3ème réédition de mon livre (mise à jour avec de nouveaux outils) est disponible depuis mars.
Je suis présente sur Facebook et Instagram : Géraldine Loty Calleo Orthopédagogie.