Limiter l’enchaînement des difficultés en repérant les troubles spécifiques des apprentissages et en aménageant sa pédagogie.
Un livre de Roselyne Guilloux
Ce livre est un recueil de toutes les connaissances actuelles sur les “dys : dyslexie, dyscalculie, dysphasie, dysorthographie, dyspraxie et aussi un petit détour par le TDA/H.
Non seulement, les troubles d’apprentissage y sont expliqués de manière très simple, avec des exemples de situation, des explications scientifiques et cognifives, mais de plus, pour chaque trouble, l’auteur nous propose des aménagements pédagogiques simples et réalisables en classe.
Cet ouvrage des éditions “Chenelière éducation” reprend une “dys” par chapitre et bon nombre de tableaux récapitulatifs.
Un vrai petit bijou pour les pédagogues.
Interview de Roselyne Guilloux
Comment pourrait-on vous décrire en trois mots ?
Roselyne Guilloux : Je serais bien incapable de répondre àtte question !
Quel est, en quelques lignes, votre parcours professionnel ? Comment expliquez-vous ces changements de carrière ?
Roselyne Guilloux : Depuis toujours, je voulais « être maîtresse », comme beaucoup d’enfants et ça ne m’a jamais quittée ; comme j’aimais beaucoup l’anglais, je suis devenue professeur d’anglais en collège (en France, auprès de jeunes de 11 à 15 ans) et très vite, je me suis intéressée aux élèves en difficulté, en souffrance, et j’ai cherché des pistes pour les aider. J’ai alors commencé des études de psychologie (tout en enseignant à temps plein) qui m’ont tellement passionnée que je les ai terminées et je suis devenue psychologue dans un CMP (centre médico-psychologique). Là, j’ai vu des enfants « malades de l’école » (anxiété, stress, phobies scolaires…) alors je me suis dit que le poste le plus stratégique était celui de psychologue scolaire.
Depuis 15 ans, je travaille donc dans un RASED (réseau d’aides spécialisées aux enfants en difficulté –dans le cadre de l’éducation nationale) et j’interviens auprès d’enfants de 3 à 12 ans. Mon rôle consiste à essayer de comprendre pourquoi un enfant est en panne de réussite scolaire et/ou de motivation, pour donner des pistes d’aides aux enseignants et aux parents.
Parallèlement, j’ai éprouvé le besoin d’écrire des livres à l’intention des enseignants. J’ai donc la chance de pouvoir concilier toutes mes passions en un seul métier : les enfants, la pédagogie, la psychologie et l’écriture !
Je crois que le « fil rouge » de ces changements de carrière est tout simplement la défense du droit à la différence.
Pourquoi vous êtes-vous intéressée aux « dys » ?
Roselyne Guilloux :Au départ, je me sentais très démunie, face à certains élèves, pour proposer des pistes d’aides aux enseignants. J’avais du mal à comprendre leurs difficultés malgré leur intelligence évidente.
Quand on a commencé à mieux connaître les troubles des apprentissages grâce aux neurosciences, j’ai compris que ces enfants déconcertants étaient en fait porteurs d’un de ces troubles spécifiques et que l’on pouvait les aider à contourner une partie de leurs difficultés.
Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ?
Roselyne Guilloux :J’ai écrit ce livre à partir de mon mémoire de validation d’un diplôme universitaire sur les troubles des apprentissages.
En tant que psychologue scolaire, je m’intéresse à la réussite des élèves, en tant que psychologue, je me soucie de leur bien-être psychologique ; or, ces enfants sont en souffrance sur les 2 plans. De plus, les enseignants sont souvent démunis face à ces enfants intelligents mais déconcertants. J’espère que ce livre contribue un peu à aider les enseignants et, par ricochets, les enfants.
Je voulais surtout faire passer l’idée que ces enfants ne sont ni paresseux, ni remplis de mauvaise volonté : ce sont des enfants intelligents qui souffrent de leurs difficultés et pour qui l’école demande des efforts considérables. Leur fatigue est réelle et il faut en tenir compte.
J’ai bien conscience que la pédagogie différenciée demande du travail supplémentaire aux enseignants qui sont de plus en plus sollicités, mais ils sont aux premières loges pour éviter l’effet domino. Ils ne feront pas disparaître le trouble des apprentissages mais leur pédagogie adaptée et leur regard bienveillant éviteront les conséquences psychologiques : la mauvaise estime de soi, l’anxiété, les affects dépressifs, la démotivation… et permettront à ces élèves d’aller au plus loin dans leurs études.
Je cite souvent cette phrase attribuée à Einstein : « tout le monde est un génie, mais si on juge un poisson sur sa capacité à grimper aux arbres, on pensera qu’il est stupide ». Cela s’adapte parfaitement aux TSA : si on juge un enfant dyslexique sur sa lecture, un enfant dysphasique sur son langage, un enfant dyspraxique sur son écriture, on pensera qu’ils sont stupides. Et, plus grave, ils finiront par penser eux-mêmes qu’ils le sont réellement.
Le 1er des aménagements pédagogiques avec ces enfants, c’est le regard bienveillant !
Pour vous, quels sont trois éléments nécessaires pour qu’un enfant devienne un apprenant épanoui ?
Roselyne Guilloux :Peut-être suffit-il d’un seul ingrédient pour être un apprenant épanoui : la motivation intrinsèque, celle que l’on a envie de retrouver quand on découvre qu’on peut avoir du plaisir à apprendre pour soi ? Mais cette motivation-là passe d’abord par le regard bienveillant de l’adulte (parents et enseignants). Un regard qui dit : « moi, adulte, je suis désireux de ta réussite et de ton bien-être et je crois en toi ». C’est ce regard positif qui va donner à l’enfant, la confiance et l’estime de soi nécessaires à la motivation et aux apprentissages.
Enfin, bien sûr, pour être un apprenant épanoui, il faut d’abord que l’élève vive une vie d’enfant sécurisée, sécurisante, contenante mais pas coercitive, protégée des conflits et préoccupations d’adultes… On demande trop souvent aux enfants d’aujourd’hui de s’adapter à des situations compliquées auxquelles nous, adultes, aurions du mal à faire face. Le stress est un inhibiteur des apprentissages, or, il est de plus en plus présent dans nos vies et dans celles des enfants.
Comment rêvez-vous l’école de demain ?
Roselyne Guilloux :Il y a aujourd’hui, une très grande pression sur la réussite scolaire qui place les enfants en « obligation d’être bon élève ». Ceux qui manquent d’estime de soi, de confiance ou qui ont des difficultés scolaires, familiales, sociales, ne peuvent l’assumer, en souffrent, se démotivent et finissent par décrocher du système scolaire.
Je rêve donc d’une école « du plaisir d’apprendre » pour les élèves et « du plaisir de transmettre » pour les enseignants. Une école où l’on ferait la part belle au développement personnel, à la créativité, au relationnel ; une école où les évaluations seraient plus qualitatives que quantitatives. Une école où l’on prendrait en compte les intelligences multiples plutôt que l’Intelligence et la capacité d’adaptation au système scolaire. Une école où à la fin de la journée, un élève dyslexique, un élève à haut potentiel et un élève en difficulté quelle qu’en soit l’origine, puissent se dire : « je suis heureux d’aller à l’école ! » et les enseignants : « j’ai rempli ma mission de passeur de savoir et d’accompagnement vers la citoyenneté ».
Qui parle d’utopie ?…